Quels outils de contrôle pour éviter la corruption dans notre collectivité ?

Session publique du 25 juin 2018.

Question d’actualité de Jean LOCTIN :

Conseiller départemental du canton Nord Toulois

Mes chers collègues,
Monsieur le Président,

Notre assemblée n’a jamais été interpellée pour réfléchir et mettre en œuvre des procédures de prévention « de la corruption, du trafic d’influence, de la concussion, prise illégale d’intérêt, détournement de fonds publics et/ou favoritisme ». Je vous rassure tout de suite, ce sont les termes communs employés par l’agence française anticorruption, crée par la loi Sapin II de 2016.

Comprenons-nous bien : il s’agit de mesurer l’état de sensibilisation de nous même et des fonctionnaires territoriaux afin d’élaborer des mesures d’alerte.

Même si vous aurez le soin de nous répondre ou de nous faire répondre que ceci ne nous concerne pas ou qu’il n’y a pas de corruption dans nos collectivités, ce dont nous ne doutions pas, pour autant, vous l’aurez bien compris, notre requête a pour seul objectif que nous définissions ensemble et sous couvert du législateur des procédures générales pour nous en protéger collectivement.

En d’autres termes, il devient indispensable de mettre en place une cartographie des risques afin que dans chaque domaine d’activité sensible de nos missions, les risques potentiels de corruption soient identifiés et les procédures adéquates pour les rendre impossibles ou, en tout cas, les éviter.

Lors de la passation de marché, d’octroi de subvention ou d’embauche de personnel, habitat/logement, fonds européens, mécénats, coopération décentralisée, communication, action sociale dans les organismes associés : office publics d’habitat, SDIS, établissements divers, ne soyons pas candides, chacun d’entre nous élus, chacun des fonctionnaires peut être l’auteur involontaire d’une « malveillance », au pire victime d’une tiers personne coupable.

La loi laisse aux acteurs publics la charge de cette précaution, dont nous savons qu’elle nécessitera des moyens humains et financiers mais c’est un investissement indispensable pour la saine gestion des deniers publics, pour la reconquête de l’opinion de nos concitoyens, en supprimant toute suspicion : existe-il un contrôle interne dans notre collectivité ? Un code de déontologie ? Un dispositif d’alerte ? Une évaluation de l’intégrité des marchés, l’inclusion d’une clause anti-corruption dans nos contrats, une formation des élus et des agents ?

Je tiens à rappeler combien notre pays est un mauvais élève, non pas en terme d’effectivité de la corruption mais en matière de prise en compte du phénomène.

Monsieur le Président, pouvez-vous nous confirmer inscrire cette initiative et cette démarche au vote de notre assemblée lors d’une prochaine session plénière ?

Merci de votre réponse.

Jean LOCTIN

 

Réponse de Michèle PILOT :

Conseillère départementale du canton de Toul

Merci, Monsieur le Président.

Monsieur le Président,
Mes chers collègues,

nous partageons votre point de vue quant à l’exigence d’exemplarité qui doit être la nôtre. Gérer une collectivité, c’est gérer l’argent public avec responsabilité. Nous sommes dans une période de forte remise en cause des politiques et l’actualité régionale, à travers la question du conflit d’intérêt soulevée par une élue régionale a braqué à nouveau les projecteurs sur la probité attendue des élus.

Contrairement à ce que vous évoquez, je ne dirais pas que cela ne nous concerne pas, mais que nous mettons tout en œuvre pour que cela ne nous concerne pas. Votre question s’inscrit dans une actualité immédiate avec les publications régulières de l’Agence française anticorruption créée par la loi SAPIN II du 9 décembre 2016.
Cette agence peut venir ainsi conforter les bonnes pratiques existantes, apporter un rôle de conseil et d’appui, sur demande des collectivités. Elle est amenée à engager des procédures de contrôle qui concernent le secteur des collectivités territoriales. Elle propose aussi dans son offre des actions de formation et de sensibilisation à la lutte contre les infractions évoquées.
L’élaboration d’une cartographie des risques peut constituer une des actions possibles en la matière même si, à l’heure actuelle, notre collectivité veille avec soin à la gestion du risque dans les domaines que vous citez.
Pour cela, nous disposons au sein de notre collectivité de certains outils. Tout d’abord, au titre du contrôle externe, les contrôles de la chambre régionale des comptes peuvent permettre de découvrir des situations financières qui rejoignent les thématiques que vous évoquez. Les contrôles successifs, pour l’instant, n’ont jamais abordé ce sujet concernant notre collectivité.

En termes d’organisation interne, je citerai trois exemples concrets qui illustrent comment nous nous engageons à prévenir les risques que vous évoquiez.
Tout d’abord, le service de la commande publique, autour de Madame Solange BAILLY, a dans ses missions un rôle de gardien dans la qualité et la sécurité d’élaboration des marchés et régulièrement des contrôles internes sur des échantillons de marché, notamment la régularité de la passation, la qualité des argumentaires etc. Tous ces échantillons de marché sont effectués.
Concernant les marchés publics, cette vigilance s’exerce aussi dans le cadre de la présentation des marchés à la CAO, avec par exemple une demande d’avis de la CAO de façon facultative par rapport aux textes sur des marchés importants financièrement afin que la décision soit prise en prenant soin de distinguer celui qui décide et celui ayant réalisé l’analyse technique.
Et, au niveau des ressources humaines, nous avons nommé à l’automne dernier, conformément à la loi, une déontologue, qui est un agent de la collectivité et qui a un double rôle : celui de recueil des sollicitations de la part d’agents ou des élus départementaux sur la description de faits qui sont de nature à enfreindre les enjeux de déontologie et de probité et également d’alerte sur des situations anormales qui mettent en cause la responsabilité de la collectivité en matière de déontologie. Je dois vous dire qu’à ce jour et depuis l’automne 2017, aucune alerte n’a été enregistrée.

Bien sûr, tout cela ne veut pas dire que le risque n’existe pas. Mais le Conseil départemental 54 n’est pas dans une situation dégradée sur ces sujets. Au niveau des votes de l’Assemblée, le service de Madame MOUCHARD veille à ce que les élus départementaux ne prennent pas part au vote lors d’une subvention lorsqu’ils sont concernés au titre d’un autre mandat électif. Mais je vous confirme que le sujet évoqué est un sujet pour lequel notre majorité à une vigilance particulière et que notre collectivité est organisée pour y faire face.

Je vous précise que le partenariat avec l’AFA sera recherché et notamment dans le domaine de la formation, afin que les élus puissent en bénéficier au titre du droit à la formation des élus, s’ils le souhaitent. Enfin, mon cher collègue, je vous propose que dans le cas de la commission Finances et Europe nous puissions poursuivre cette question et que, si vous aviez des sujets plus précis, nous puissions en débattre.