Un plan pauvreté peu efficace

Session publique du 20 Septembre 2021

Question d’actualité de Michel MARCHAL

Conseiller départemental du canton de Baccarat

 

Monsieur le Préfet, Madame la Présidente,

À grand renfort de communication, fin 2018, le Président de la République, conscient que nous avons sur le territoire national environ 14% de pauvres selon les critères retenus (100 000 en Meurthe-et-Moselle), a mis en place une stratégie de prévention et, sans surprise, les conseils départementaux, collectivité exerçant la compétence sociale, y furent associés.

L’État étant partenaire de ce dispositif, Monsieur le Préfet, cette question vous est bien évidemment adressée, ainsi qu’à la Présidente du département.

L’indicateur européen affiche le seuil de pauvreté à un revenu inférieur à 1 063 euros.

Une étude de l’INSEE, réalisée avant la crise du COVID, démontre que la pauvreté ne se limite pas à un seuil monétaire. La privation matérielle et sociale s’ajoute également aux critères de pauvreté. Si nous prenons en compte ces indicateurs liés aux difficultés de paiement, de logement et de consommation, l’INSEE considère que 1/5ème de la population est en situation de pauvreté.

Dans cette démarche, notre département s’est engagé en amont de la mise en place de ce dispositif. Il est ainsi devenu, au niveau national, un des dix territoires démonstrateurs. Nous avons donc un temps d’avance.

Les discours de la majorité départementale sur sa politique sociale et l’autosatisfaction permanente qui l’anime font apparaitre que le taux de pauvreté dans notre département n’est pas inférieur aux autres collectivités.

Dans notre département, un travail a été conduit sur chacun des territoires dans le cadre des Commissions Territoriales de Développement Social. Une restitution à mi-parcours nous a été présentée.

Ce plan, prévu sur 3 ans, arrive prochainement à son terme.

Pouvez-vous, Madame la Présidente, nous rappeler les actions conduites et les crédits globaux engagés sur cette politique, en détaillant les fonds d’État et ceux du département ?

Pouvez-vous, monsieur le Préfet, madame la Présidente, nous préciser si ces actions ont fait baisser le taux de pauvreté dans notre département ?

En d’autres termes, devons-nous nous satisfaire d’un plan de prévention et de lutte contre la pauvreté, tel qu’il existe, qui n’éradiquera pas la misère ? Cette politique aidera-t-elle les personnes concernées à mieux accepter leurs conditions de vie ?

Je vous remercie de vos réponses.

Michel MARCHAL

 

 

Réponse de Arnaud COCHET

Préfet de Meurthe-et-Moselle

 

Le département s’est engagé avec l’État dès 2019 en qualité de département démonstrateur dans la stratégie pauvreté. Les crédits d’État alimentant le
conventionnement spécifique sont passés de 1.3 M€ en 2019 à 2.4 M€ en 2020 et la dotation prévisionnelle 2021 est de 2.7 M€.

Trois objectifs principaux structurent la stratégie pauvreté nationale : l’insertion des bénéficiaires du RSA, l’accompagnement social dont principalement celui
des jeunes sortant de l’ASE et la prévention.

Un second volet permet au département de programmer des actions en fonction d’un diagnostic territorial approfondi qui émane notamment de la gouvernance
spécifique « lutte contre la pauvreté » du département, c’est-à-dire les Conférences Territoriales de Développement Social.

Le taux de pauvreté dans le département est toujours calculé sur des données Insee antérieures de 3 ans (15,4 % en 2018 pour le département), ce qui ne permet pas de répondre à votre question pour ce qui est de la situation actuelle.

Nous savons tous néanmoins que les effets sociaux de la crise sanitaire ont été contenus s’agissant du chômage (7,4 % dans le département), que la demande de
RSA était revenue à un niveau très proche en mars 2021 de son niveau de mars 2019 (près de 43 600 bénéficiaires), que les paniers d’aides alimentaires ont
augmenté de 10 % à 25 % mais avec de fortes variations d’une structure à l’autre (la soupe aux sans-abris est revenue à son niveau d’avant crise sanitaire), que le
niveau d’endettement moyen n’a pas augmenté comme en témoigne les bailleurs sociaux ou la banque de France, que les expulsions locatives sont en baisse.

Autrement dit que les aides conjuguées de l’État, des caisses de sécurité sociales et des collectivités dont le conseil départemental ont permis de limiter
fortement les risques de paupérisation en particulier d’une population juste au-dessus des seuils d’aide.

Il faut bien entendu nuancer et affiner ce diagnostic global. Certaines catégories de population comme les étudiants, privés de petits boulots, ont pu connaître
une précarisation.

D’autre part au plan territorial, le département présente toujours une forte disparité entre des indices de précarité très forts dans le lunévillois et le pays
haut comparé au secteur périurbain.

On peut néanmoins avancer que le conventionnement pauvreté entre l’État et le département a puissamment contribué à prévenir la paupérisation d’une partie
de la population Meurthe-et-Mosellane plus éloignée de l’emploi. Notamment il a permis d’encourager de nombreuses initiatives et acteurs pour aller vers les
personnes ne se manifestant plus.

Pendant le confinement, la mise en réseau des acteurs de la pauvreté copilotée par département et État a été extrêmement utile pour organiser une dizaine de
distributions alimentaires supplémentaires. Plusieurs formules mobiles ont vu le jour ces derniers mois pour aller au devant des personnes en secteur rural (bus
mobile de l’ARS, de relais villes et villages, des Restos du cœur etc.). Autre exemple : la Banque Alimentaire et l’opérateur Transboulot ont été puissamment
soutenus par l’État Plan de relance) et le département (stratégie pauvreté) pour ouvrir une permanence logistique à Crusnes dans le pays haut. Celle-ci sera
inaugurée le 16 octobre prochain.

Au vu des bons résultats sur ces 2 premières années, l’avenant 2021-2022 qui est proposé au conseil départemental sera marqué par une augmentation de 206
874,57€. (+8,2 %), soit une contribution globale de l’État de 2,7 M€.

L’augmentation portera en particulier sur l’insertion des bénéficiaires du RSA à travers 3 priorités : les délais d’orientation, le déploiement des référents de
parcours et le partenariat avec Pôle Emploi.