Un État responsable de tout, un département responsable de rien…

 

Session publique du 22 mars 2021

Intervention de Luc BINSINGER :

Conseiller départemental du canton de Jarville-la-Malgrange

Madame la Présidente,

Mes chers collègues,

 

Je profite de ce 1er rapport pour revenir sur le préambule de notre séance de questions d’actualité de lundi, vous avez tenu, Madame la Présidente, à nous adresser un discours de politique générale portant notamment sur la situation sanitaire et la campagne vaccinale.

Un discours de politique générale, ou plutôt devrais-je dire un discours de complainte générale !

Vos propos ont le mérite de la clarté : l’État est responsable de tous les maux, le département ne dispose d’aucun remède pour les guérir.

Vous nous indiquez que « le département reste au cœur de l’action dans la gestion de la crise, avec ses partenaires : les communes, les intercommunalités, le CHRU, […] les services de l’Etat, […] les professionnels de santé [et nos] partenaires associatifs. » Au cœur de l’action oui, mais avec des artères manifestement bouchées !

Comment pouvez-vous parler d’« équité territoriale », Madame la Présidente, alors que les six premiers centres de vaccination en Meurthe-et-Moselle puis 9 ont été ouverts sur le seul territoire de la Métropole du Grand Nancy, lieu d’implantation actuel de votre prédécesseur au sein de cette assemblée alors que la commande sanitaire était d’un centre pour 100 000 habitants. Le travail du département aurait dû être de veiller à la juste répartition de ces centres. Et il ne s’agit là que d’un exemple parmi d’autres…

Quelle image renvoyez-vous aux habitants du Saintois, du Lunévillois, du Pays de Briey, ou encore du Pays Haut, lorsque vous cautionnez une concentration des moyens vers la ville-centre, au mépris des territoires ruraux et péri-urbains ? Veillons à rassembler les territoires plutôt qu’à les opposer. Car c’est par la synergie collective que nous parviendrons à trouver une issue positive.

Indéniablement, notre collectivité aura fait preuve d’un manque de leadership criant, pour un département qui se réclame pourtant « proche et solidaire ».

Nous savons tous, pour le vivre respectivement dans nos communes, dans nos intercommunalités, dans nos cantons, la difficulté du pilotage d’une telle stratégie, où des informations souvent partielles et parfois incomplètes nous parviennent, ne donnant que trop peu de visibilité au décideur public. Mais cela ne saurait être un prétexte pour se soustraire à nos propres responsabilités. La décentralisation Madame la Présidente, il y a ceux qui en parlent, et ceux qui la pratiquent.

Je tiens à saluer à ce titre, au nom de l’UDC, l’action quotidienne et infatigable de nos élus locaux, de nos maires, des agents territoriaux… de ces clés de voûte de la proximité qui se démènent, au prix d’injonctions parfois contradictoires, pour assurer la protection des populations et pour répondre spontanément et dans des délais souvent insupportables.

Alors que cette pandémie se poursuit, nous souhaitons à nouveau rendre hommage à nos professionnels de santé, à nos associations, aux bénévoles… à tous ces artisans de la guérison du corps et de l’âme, qui ont plus que jamais besoin de notre soutien pour agir aux côtés des plus fragilisés.

Parce que ce qui se conçoit bien s’énonce clairement – et au risque de perturber certaines étroitesses idéologiques ! – nous privilégions nous aussi la course pour la vie sur la course au profit !

Mais au-delà des déclarations d’intention et du verbe grandiloquent, nous pensons que la solution se trouve résolument dans l’action.

Déclarer le vaccin contre la COVID-19 comme « bien commun universel », pourquoi pas. Mais au-delà des discours populaires – et parfois populistes ! – il y a une autre réalité : celle du financement de l’innovation.

Je pense par exemple à la start-up allemande BioNTech, subventionnée par l’Union européenne, qui a investi dans la recherche pour proposer un partenariat avec Pfizer dans la production de vaccins contre la pandémie. Lever les brevets fait aussi courir le risque de créer un précédent dans le domaine de la propriété intellectuelle. En qualité de responsables publics, nous devons avoir ces éléments à l’esprit.

Nous pouvons tous faire preuve de bons sentiments, mais l’allocution que vous avez prononcée lundi matin couplée à la motion présentée ce jour conduisent, au choix, soit à enfoncer des portes ouvertes, soit à porter un coup d’épée dans l’eau.

Nous partageons l’objectif et la philosophie de la démarche, mais le sens de notre engagement ne pourra s’illustrer qu’à travers l’exercice de la plénitude de nos compétences départementales, et non en « posant des principes » comme vous nous l’expliquez. Car non, Madame la Présidente, le marketing et la cosmétique ne font pas une politique.

En ce sens, aucune réelle stratégie départementale n’a été présentée à notre assemblée. Comme nous le soulignions lors de la séance des questions d’actualité, nous avons connaissance par bribes des discussions qu’entretient le département avec ses partenaires. Un département pilote dites-vous, mais hélas toujours assis sur le siège passager.

Oui Madame la Présidente, ce qui est valable dans vos critiques à l’encontre de l’Etat sur la lutte contre la pauvreté doit aussi trouver à s’appliquer dans notre approche de la lutte contre la pandémie : « cessons d’être dans les intentions ».

Alors que vous évoquez un « département offensif dans sa capacité à être aux côtés de chaque meurthe-et-mosellan », gageons que cette action offensive permette à notre collectivité de se démarquer afin d’atteindre son but… au risque de se retrouver définitivement hors-jeu.

Je vous remercie.

Luc BINSINGER