Assurer un service juste et équitable pour le département

Session publique du 24 septembre 2018.

Question d’actualité de Thibault BAZIN:

Conseiller départemental du canton de Lunéville-2

Monsieur le Préfet,

Les attentes envers l’Etat de nos territoires, de leurs habitants et de leurs acteurs socioéconomiques, sont fortes dans plusieurs domaines. Je souhaite ainsi attirer votre attention sur des politiques publiques dont les résultats perçus dans mon canton se font attendre, en particulier les accès aux services. Je souhaite que vous puissiez – avec l’aide de vos services dont je salue l’implication – apporter des solutions concrètes afin d’assurer un juste et équitable service sur l’ensemble de notre département. Il en va de la cohésion des territoires.

Concernant la téléphonie fixe :

Plusieurs concitoyens et élus, de Fraimbois, Vallois et Magnières, m’ont contacté suite à l’annonce de l’opérateur Orange de mettre fin à l’offre de base de téléphonie fixe à compter du 15 novembre prochain, en contraignant ainsi ses abonnés à brancher leur téléphone à une box internet. Beaucoup s’interrogent sur la fin programmée de la téléphonie fixe, notamment les entreprises qui utilisent encore le réseau téléphonique commuté (RTC) pour leurs standards, leurs fax, leurs alarmes, les personnes âgées qui passent aussi par le réseau RTC. Pour ceux qui emménageront à partir de cette date, les particuliers se verront proposer un raccordement IP (sous protocole internet) sur support cuivre (ADSL), ou fibre optique. Pour ceux qui sont déjà raccordés, les lignes téléphoniques existantes continueront de fonctionner pendant 5 ans au moins. Au sein de mon canton, les abonnements internet fonctionnent déjà très mal. Mais si nous obligeons les habitants à partir du 15 novembre à installer une box internet, la téléphonie risque de ne pas mieux fonctionner. Cette nouvelle annonce est encore un coup porté au milieu rural et notamment nos aînés qui ne souhaitent pas investir dans une box.

Quelles sont les actions envisagées par l’Etat afin qu’aucun habitant ne soit pénalisé ?

Concernant la téléphonie mobile :

Je vous ai relayé « l’inquiétude du maire de Saffais et de ses habitants devant les difficultés qu’ils rencontrent depuis plusieurs années avec le réseau mobile ». Même si Saffais ne peut être considérée comme commune en « zone blanche » au sens de la définition retenue par l’Etat, il est indéniable que les habitants et professionnels de la commune rencontrent sur certains secteurs de réelles difficultés en matière de téléphonie mobile. Imaginez que dans la commune voisine de Coyviller, à moins de 20 km de Nancy, sur 90 téléphones portables recensés, seuls 6 ont une bonne réception à l’intérieur de leur habitation et 8 à l’extérieur de l’habitation. Désormais la problématique de la couverture et de l’implantation de nouveaux pylônes de téléphonie mobile relève des seuls opérateurs nationaux de téléphonie mobile. Ceux-ci auront toutefois la chance de traiter les secteurs signalés sur le portail France Mobile, et de respecter les priorités établies au niveau départemental.

Pourriez-vous, Monsieur le Préfet, nous indiquer les modalités et critères envisagés ? Au regard des critères de priorisation des dossiers constatés utilisés en janvier 2018, à savoir le nombre de logements et de locaux professionnels, et du faible nombre de communes retenues chaque année, à quelle échéance peut-on espérer une résolution pour Saffais ? Le critère quantitatif ne risque-t-il pas de disqualifier durablement les très petites communes ? Pourrions-nous d’ores et déjà étudier en temps masqué les conditions technicoadministratives d’installation des pylônes nécessaires ?

Concernant la lutte contre les cambriolages et les incivilités sur les espaces publics :

Plusieurs communes souhaitent poursuivre le déploiement de la vidéo-protection, comme à Rosières-aux-Salines. Il s’agit d’un outil qui a prouvé son efficacité par la baisse drastique du nombre de cambriolages depuis sa mise en place (de 18 à 2 en une année). D’autres espaces où des vols à la roulotte sont commis de manière récurrente pourraient justifier de nouvelles caméras après un audit sûreté mené par les experts de la gendarmerie. Aucun des 10 dossiers déposés au titre du Fonds Intercommunal de Prévention de la Délinquance (FIPD) en 2017 ont été retenus. 7 ont été reportés en 2018.

Monsieur le Préfet, est-ce que l’Etat envisage de soutenir financièrement de tels investissements qui aident considérablement les forces de l’ordre dans leurs missions, le cas échéant, à quelle hauteur et sous quelles conditions ?

Concernant la sécurité routière :

Des communes souhaitent installer des cinémomètres pédagogiques, comme à Virecourt. Pour ce type de radar, en complément d’une éventuelle subvention au titre des amendes de police réparties par le Conseil Départemental, il pouvait y avoir une subvention être au titre du Plan Départemental des Actions de Sécurité Routière (PDSAR).

Pourriez-vous nous indiquer, Monsieur le Préfet, si les radars pédagogiques pourraient être éligibles dans la circulaire à venir ?

Concernant l’accompagnement financier des communes prioritaires pour réaliser leur assainissement :

Lors du Conseil d’administration du 29 juin 2017, l’Agence de l’Eau Rhin-Meuse a souhaité diminuer le taux de subvention, initialement de 80%, des projets d’assainissement. Les communes avaient lancé des études, préalables à tous travaux d’assainissement, sur les conseils et grâce au soutien financier considérable de l’agence. C’est en espérant ce taux de subvention de 80% mis en place initialement pour les travaux que les maires des communes rurales ont convaincu leur conseil d’engager ce type de projet. Aujourd’hui, avec la baisse de ce taux à 60% ou 70% selon les cas, de nombreuses communes rurales, à l’instar de Méhoncourt, Charmois, Giriviller, Vennezey, Rozelieures ou Saint-Germain ne souhaitent plus engager des travaux d’assainissement en raison du montant restant à leur charge trop important, malgré les subventions déjà promises. L’agence de l’eau ne pouvait plus assumait financièrement ce taux de subvention en raison de l’accélération des demandes d’aides de la part des collectivités et de la contribution au redressement des finances publiques demandée par Bercy. Ainsi, au 1er mars 2018, les projets d’assainissement représentaient, pour les seuls projets prioritaires, près de deux fois le montant supérieur aux capacités annuelles de l’Agence de l’Eau Rhin-Meuse. Cette dernière vous a sollicité afin que des solutions puissent être trouvées à travers d’autres fonds de l’Etat pour combler cet engagement de financement partiellement respecté.

Aussi envisagez-vous, Monsieur le Préfet, que cette baisse du taux de subvention décidée par l’agence de l’eau pour les projets prioritaires d’assainissement puisse être compensée par une subvention équivalente de l’Etat au titre par exemple de la DETR ?

Concernant la présence des trésoreries dans la proximité :

Dix ans après la fusion entre Direction Générale des Impôts et Direction Générale de la Comptabilité Publique, le Cour des Comptes a émis dans un rapport des recommandations pour  » accélérer la transformation  » de la Direction Générale des Finances Publiques. Dans la continuité du triptyque suppression de la taxe d’habitation (1) – prélèvement à la source (2) – télédéclaration (3) et de la diminution nette des effectifs de 17% sur dix ans, le Gouvernement souhaite poursuivre dans cette lignée avec le plan  » CAP 2022 « . Bien qu’aucun chiffre officiel ne soit paru, il semble que l’administration fiscale subira une suppression annoncée de 20 000 postes. Il sera notamment attendu de la part de l’Etat un resserrement du réseau des trésoreries, à l’instar de celle de Blainville-sur-l’eau. Sur les plus de 4 000 implantations locales en France, 1600 comptent moins de 10 agents, toutes potentiellement menacées. Certains syndicats actent même le fait qu’il n’y aura à moyen terme plus qu’une trésorerie par EPCI, parfois dans des Maisons de Services aux Publics. Si cette hypothèse – alarmiste – se confirme, je tiens à vous alerter, Monsieur le Préfet, sur ce que cela représenterait pour notre département en termes d’accessibilité des services en milieu rural. Déjà impactés par les hausses des taxes sur les carburants et sur la limitation de la vitesse à 80km/h, les territoires ruraux seront une fois de plus moins bien desservis. Il faudrait alors parfois plus de 30 minutes en voiture pour accéder à ces services. Dans cette optique, et alors que de nombreux retraités vivent dans ces villages, que de nombreux maires ou secrétaires de mairies sont en quête de conseils budgétaires, ce projet semble préjudiciable.

Monsieur le Préfet, nous pouvons nous demander quelles trésoreries sont menacées et combien de postes la Meurthe-et-Moselle perdra-t-elle ? Une étude d’impact devrait être réalisée pour mesurer les conséquences des suppressions éventuelles des petites trésoreries de notre département. Pourriez-vous, Monsieur le Préfet, nous garantir qu’il restera au moins une trésorerie par EPCI avec des effectifs présents ?

Concernant la juste évaluation des valeurs locatives des locaux professionnels :

J’ai été interpellé par des professionnels de l’immobilier de Lunéville au sujet des locaux commerciaux dans la catégorie MAG 3 (commerces sans accès direct sur la rue). Dans le secteur 3 comprenant Lunéville, le tarif est de 336,90€/m². Je souhaite porter à votre connaissance que pour cette même catégorie dans le secteur 2, le tarif pratiqué est de 122,40€/m². Vous mesurez la différence. L’administration fiscale confirme la délimitation des secteurs d’évaluation. Pourtant, cela semble incohérent avec le déploiement du plan « cœur de ville ». En effet, de tels montants vont pénaliser l’attractivité commerciale à Lunéville par une telle différence fiscale.

Pourriez-vous, Monsieur le Préfet, envisager avant la clause de revoyure de 6 ans un nouvel examen de la situation évoquée en consultant de manière plus approfondie les commissions locales ?

Je vous remercie par avance, Monsieur le Préfet, pour les réponses que vous pourrez apporter devant notre assemblée, afin d’améliorer l’accessibilité des services sur l’ensemble du territoire de notre département de Meurthe-et-Moselle. Le canton de Lunéville-2, composé de 54 communes, pourrait être un laboratoire d’évaluation des politiques publiques visées.

Nous sommes prêts, avec ma binôme Anne LASSUS, à nous engager dans cette démarche.

Thibault BAZIN

 

 

Réponse de Eric FREYSSELINARD :

Préfet de Meurthe-et-Moselle