La position de l’UDC lors du Débat d’Orientation Budgétaire 2018

Session publique du 24 novembre 2017.

Intervention de Jean LOCTIN :

(Conseiller départemental du canton Nord Toulois)

Monsieur le Président, mes chers collègues,

Avant même de nous exprimer sur le contenu de ce rapport, nous voudrions vous sensibiliser sur les conditions et les modalités d’organisation des débats d’orientations budgétaires, qui, au gré du temps, ne sont devenus qu’une formalité administrative, sans véritable utilité.

L’examen du budget 2018 des actions de notre département débutera le 11 décembre prochain, et compte tenus des délais de communication des documents s’y attachant, au plus tard ce mardi 28 novembre, vous conviendrez que le débat d’aujourd’hui, s’il était envisagé comme l’esprit de la loi le suggère, ne permettrait pas l’intégration, en si peu de temps, des réflexions et des orientations que nous aurions été amenés à trouver ensemble.

C’est dire l’aspect formel de cet exercice au terme duquel nos réflexions seront balayées comme un moustique gênant sauf à organiser un premier débat, peu de temps après la présentation du compte administratif c’est-à-dire la prise en compte des réalisations passées, de l’évolution réelles des grands agrégats de recettes et de dépenses de fonctionnement, de fiscalité et de dotation, de capacité d’épargne et d’emprunt, nous donnant une vision à moyen terme, et non d’une année sur l’autre, des ressources sous-tendant nos politiques d’action publique. En d’autre termes, s’engager dans une réelle prospective budgétaire.

Mes chers collègues, la diffusion de nos échanges sur les réseaux sociaux à l’avantage de nous permettre d’être entendus par tous, mais nous oblige, tout particulièrement, à être pédagogues, sans usage de la « novlangue ».
Chacun ici partage la volonté d’une Europe ouverte et protectrice, assurant la paix à chacun ; ça impose des règles et des devoirs : la France, notre pays a été tenu, à plus d’efforts que d’autres.

C’est dans cet esprit que les contributions au redressement des comptes publics n’ont pas épargné nos collectivités locales depuis 2014 et a servi de cadre et donc de contrainte dans le choix et le volume de nos politiques publiques et de leur financement.

Nous entendons, bien sûr, ceux qui dénoncent cette austérité imposée alors que les « Paradise Papers » révèlent des milliards d’euros détournés d’une empreinte fiscale dont nous sommes privés.
Ceci concerne la politique nationale, et l’action de nos parlementaires, et nous devons nous résoudre à nous inscrire dans les contraintes imposées, non seulement de ressources mais d’évolution des dépenses.

Intéressé par ce qui devrait faire débat, ce citoyen, meurthe-et-mosellan qui nous regarde, s’attacherait probablement à l’architecture de votre futur budget :

678.7 millions d’euros de recettes de fonctionnement,
642.6 millions de dépenses,

Laissant une épargne (brut) de 36.1 millions.
Il constatera que celle-ci se dégrade d’année en année, non seulement par le transfert de compétences à d’autres collectivités mais en s’interrogeant sur nos dépenses de fonctionnement, leurs ventilations, sur nos recettes de fonctionnement et leur composition.

116,6 millions d’euros d’investissements que vous jugez élevés, mais dont il faut déjà retirer 24,2 millions de remboursement d’emprunt, laissant un solde à financer de 80,5 millions que vous trouvez au moyen de 63.2 millions d’emprunt nouveaux, 58.2 l’an passé, 35 en 2016.

Une dernière fois, la curiosité le poussera à savoir ce que recouvrent ces investissements, leur nécessité et leur coût individuel.

Nous disposons dans ce document, mes chers collègues, l’équivalent du « catalogue raisonné » d’un artiste recensant l’ensemble de ses œuvres : tout y est dans le détail jusqu’au « Marathon de la laïcité » sans que se dégagent les grands montants de dépenses et de recettes, leurs perspectives et leurs maîtrise.

Commençons cependant par les recettes :

Une fiscalité dynamique des DMTO nous assurant 10 millions supplémentaires. Quelles prévisions pour le moyen terme ?
Une fiscalité sur le foncier dont vous vous prévalez de la stabilité des taux depuis 6 ans, vertu bien relative au regard de l’augmentation sans précèdent depuis 10 ans, effectuée par une majorité à laquelle vous apparteniez !

Il reste à savoir si cette tendance durera…
Une dotation globale de fonctionnement qui sera maintenue à son niveau actuel mais dont le montant futur dépendra d’un conventionnement entre l’État et chacune des 319 grandes collectivités, et surtout de la mise en place d’un mécanisme de correction en cas d’écart entre les objectifs de maîtrise des dépenses de fonctionnement et la réduction de déficit, fixés au niveau national (PLFP 2018-2022).

En clair, si les objectifs ne sont pas atteints, une nouvelle baisse des dotations sera enclenchée !
Pour être plus précis, où trouver dans ce rapport les projections des ressources futures ? Quelles sont vos intentions ?

L’occasion nous est donnée également de vous suggérer une réflexion approfondie sur les garanties d’emprunt que nous accordons sans limite aux bailleurs sociaux et dont le volume est très important.
Le risque ne peut pas s’attacher uniquement au « ratio prudentiel » en vigueur actuellement, mais sur le risque maximum possible pouvant affecter durablement l’équilibre budgétaire, en cas d’appel à responsabilité.

Enfin, les emprunts et la dette.
Si cette dernière, à hauteur de 235 millions d’euros, régresse régulièrement, et actuellement,  à raison de 20 à 24 millions par an, quelles données ou informations disposons-nous pour les années à venir ? Peut-on connaître en intégrant les emprunts à réaliser en 2018, le montant annuel qu’il faudra inscrire durant 5 ans ?

Enfin comment s’appuyer raisonnablement sur les données fournies par les budgets primitifs lorsque 58.2 millions d’euros sont inscrits au BP 2017 et que seuls 35 millions d’euros ont été véritablement empruntés ?
Que recouvreront les 63.2 millions d’euros en 2018 ?
Quelle est la sincérité du budget ?
Les écritures correspondent-elles à des ambitions ou des effets d’annonce que la réalité dément ?

Poursuivons par les dépenses.

Rien, mes chers collègues, dans ce document ne fait le point sur les investissements réalisés ni ceux en cours, ni les futurs, chiffrés sur 5 ans.

Tout au plus des engagements pluriannuels nouveaux (rapport Finances 3) envisagés pour 2018 qu’il aurait été intéressant d’associer à ceux des années passés, afin de mieux cerner nos marges d’action restantes.

Le plan collèges nouvelle génération :
De 2012-2017, nous sommes passées à 2012-2021 et sans doute davantage en prenant connaissance ce lundi de votre souhait d’un collège européen dans le Pays-Haut.
Comment là encore, prendre en compte avec justesse, l’engagement annuel de ce programme pour lequel les emprunts ne sont pas toujours utilisés : 35 millions en 2017, 42 millions en 2018, dites-vous annuellement, combien annuellement au-delà pour atteindre les 300 millions annoncés ?

Le soutien aux territoires.
Nous partageons l’ambition de corriger les inégalités territoriales et sociales.
Pour autant, nous ne nous focalisons plus sur le développement du Très Haut Débit, désormais de compétence régionale ; davantage sur les errements de la téléphonie mobile dont vous semblez découvrir au gré des rencontres territoriales la persistance des mécontentements : il reste à souhaiter que nous n’en discuterons plus, l’an prochain, dans les mêmes circonstances.

Parlons de nos communes !
La réforme territoriale mise en œuvre, en application de plusieurs lois adoptées en 2014 et 2015 a poursuivi deux objectifs : renforcer les responsabilités des régions par rapports à celles des départements et réduire le nombre des intercommunalités, pour en faire, semble-t-il des structures de proximité et d’efficacité au service de l’action locale.

Dans cette logique, avec les contrats territoriaux de solidarités, faites-en l’analyse ! vous avez renforcé le soutien à certaines communes au détriment des autres : la solidarité n’y est plus perçue.
Nous souhaiterions rouvrir la réflexion sur les moyens de soutenir efficacement et plus fortement les petites communes en milieu rural au-delà de la simple dotation aux communes fragiles.

Faut-il encore évoquer les études inachevées et les actions inabouties sur le château de Lunéville et la énième concertation sur son devenir, quinze ans après l’incendie ! Vous donnez l’impression d’un fardeau, dont vous ne savez que faire !

Faut-il encore insister sur les coûts non maîtrisés des futures archives départementales par un choix inapproprié pour conserver des documents précieux ? C’est un gâchis d’argent public.

Quant à la programmation routière et son parcellement par territoire, elle ne nous permet plus une vision d’ensemble : quels crédits sont prévus pour les chaussées, les nouvelles routes, les ouvrages d’art ? En d’autres termes, quel est l’état du réseau routier départemental – ses 3.314 kms – Existe-t-il une programmation sur plusieurs années qui nous oblige pour l’avenir ?

Globalement, mes chers collègues, 116.6 millions d’investissement dont 24.5 de remboursement de dette. Ceci pour 2018. Il aurait été intéressant de connaitre dans ce montant ce qui résultait des engagements passés pour mieux comprendre ce haut niveau d’investissement dont vous vous félicitez !

Dernier point qui retient notre attention :
Nous savons combien le poids croissant des dépenses sociales ont contribué à la dégradation d’ensemble de la situation financière des départements.
Nous savons que le taux de couverture de ces dépenses s’est réduit malgré les financements spécifiques lors des transferts de compétences et depuis 2013 par le fonds de solidarité (FSD) en faveur des départements et de la dotation de compensation péréquée (DCP).

Malheureusement, dans le contexte actuel, nous ne pourrons jamais obtenir mieux de l’État et dès lors, nous avons à réfléchir sur les leviers dont nous disposons pour maîtriser nos dépenses sociales et celles de fonctionnement.

C’est, chers collègues de la majorité, un important aggiornamento, que nous devons entrevoir !

Deux raisons nous l’imposent :

En premier lieu, les propositions de la Cour des Comptes enjoignant l’État de baisser ses concours pour infléchir l’évolution des dépenses.
En second lieu, la transcription dans le projet de loi de programmation des finances publiques 2018-2022, de mesures contraignantes portant sur :

► Des objectifs individuels d’évolution des dépenses de fonctionnement et de l’endettement,
► Les modalités d’atteindre ces objectifs.

Nous devrions pouvoir en parler sereinement, mesurer l’impact des dépenses sociales et leur efficience, sur l’équilibre financier du département et décider des mesures à prendre :

► Définir des plans d’aide aux personnes âgées plus rigoureux pour maîtriser l’évolution des dépenses correspondantes, en particulier les heures de service prescrites.
► Arbitrer le choix des modes d’hébergement en matière d’aide sociale à l’enfance notamment la gestion croissante des MNA(s).
► Affirmer l’autorité tarifaire du département au travers d’objectif d’évaluation des dépenses, pour les EPHAD.
► Enfin et surtout adapter les effectifs et de l’organisation des services sociaux, dont la territorialisation a multiplié les coûts.

Pour finir une maîtrise des ressources humaines non plus à effectifs constant mais à masse salariale constante.

Voilà les quelques réflexions sur ce DOB pour lequel nous remercions tout particulièrement les services pour l’ensemble des données fournies.

Jean LOCTIN