Colline de Sion : bilan de la mission d’évaluation

Thibault Bazin

Session publique du 23 novembre 2016.

Intervention de Thibault BAZIN :

(Conseiller départemental du canton Lunéville 2)

Monsieur le Président,
Monsieur le rapporteur, cher Gautier,
Mes chers collègues,

Je voudrais tout d’abord vous remercier Monsieur le président et les services pour la communication des éléments, l’organisation des réunions. La mission a pleinement rempli son objectif d’information. À titre personnel, j’ai beaucoup appris.

En revanche, la mission d’évaluation des politiques publiques relatives à Sion semble imparfaite. Il aurait été intéressant d’examiner chacun des objectifs initiaux et les résultats constatés au regard des moyens consacrés.

Depuis 1993, le Département a souhaité, à raison, faire de la colline de SION un levier de développement local. En 1999, le Conseil Général dans son rapport évoquait une « stratégie de prise en compte et de développement de la colline de Sion-Vaudémont », de « mise en valeur par le département de ses richesses patrimoniales historiques et environnementales ». Le diocèse ne souhaitant pas porter le site, le Département s’est heureusement porté acquéreur pour 3M Francs (soit près de 450K€) de la partie non liée aux activités religieuses menées par les structures d’église.

Le projet, exposé lors de la session du Conseil Départemental du 29 juin 1999, évoquait 3 volets thématiques – spirituel, environnemental et historique – qui s’adressaient à 3 publics distincts, respectivement à Sion, à l’ensemble de la colline et à Vaudémont. S’agissant de la dimension spirituelle, le principe fondateur était de « maintenir le site de Sion comme pôle d’accueil et d’animation majeur de la colline ». On parlait même de Sion comme « pôle spirituel ».

Le Conseil Général évoquait lors d’une session en 2000 un « projet de développement culturel, touristique et environnemental du domaine de la côte de Sion ». La colline de Sion constituait « une priorité dans la stratégie du Conseil Général de développer les grands sites touristiques d’intérêt départemental ».

Les différentes parties s’accordaient en 2000 sur le fait « qu’en principe le maintien de l’ambiance de sérénité implique la proscription d’activités nocturnes trop bruyantes mais pas nécessairement toute activité de nuit. Certains types de concerts, séminaires, rencontres, cérémonies familiales, veillées culturelles, seront admises si leur contenu est en rapport avec l’image de lieu de réflexion, de ressourcement, de discussion qui veut être conservée du site ». Malheureusement cela n’est toujours pas le cas aujourd’hui en 2016. Quel dommage.

Les différentes parties s’étaient accordées en 2000 sur les orientations dégagées par l’étude d’opportunité réalisée par Mérimée Conseil, à savoir notamment :

  • Un espace muséographique
  • Un abri couvert de rencontres de groupes d’environ 600 places, qui fait encore aujourd’hui en 2016 défaut.

En 1999, on dénombrait près de 150 000 visiteurs par an. Le rapport de session du 29/06/1999 jugeait « utile de favoriser une augmentation des retombées économiques des fréquentations actuelles (et potentielles) » en s’inscrivant dans un « projet touristique global du Saintois » et en favorisant le développement de prestations commerciales adaptées aux courtes visites (restauration, commerce touristique…).

En 2015, on dénombre 83 418 véhicules entrés sur le site et 7 400 repas réalisés, et 3 802 nuitées d’hébergement. Soit un total estimé à 200 000 visiteurs dont 13 600 visiteurs à la cité et 20 000 participants aux manifestations grand public.

On peut s’interroger sur la faible progression du nombre des visiteurs malgré les investissements importants qui y ont été consentis. Si on soustrait le public se déplaçant à SION grâce au soutien financier du département – je pense aux scolaires, et si on soustrait le public se déplaçant à SION pour des manifestations financées par le Département, le flux privé aurait à peine évolué. C’est un peu décevant.

 

COUT DE LA COLLINE DE SION

L’acquisition en 2000 du domaine de la côte de Sion a coûté 734K€. Des travaux de 2001 à aujourd’hui ont coûté au total plus de 9,2M€. Soit un total avoisinant 10M€ en investissement, ce qui peut paraître énorme au regard du résultat obtenu.

Le bâtiment dit « Cité des paysages » a été financé totalement par la taxe d’aménagement pour l’équivalent de 4,2M€. L’utilisation de cette taxe portant sur les autorisations d’urbanisme (permis de construire…) pose question. En effet, investir près de 4,2M€ dans un bâtiment qui n’est pas un musée peut paraître exagéré, surtout par rapport à son usage sur un lieu qui n’est pas un ENS. On aurait pu utiliser la manne de la taxe d’aménagement départementale différemment : il y aurait pu avoir plus d’ENS départementaux… ou une baisse de la TA départementale. Vous en avez décidé autrement. Dont acte.

 

HOTELLERIE-RESTAURATION

Près d’1,6M€ ont été investis dans l’immobilier liée à l’hôtellerie et la restauration entre 2004 et 2006. L’utilisation limitée de cette hôtellerie au regard de la règlementation notamment questionne la hauteur de l’investissement par rapport au résultat obtenu. L’outil réalisé apparaît inadapté et les moyens publics consacrés un peu du gâchis.

Aujourd’hui l’offre d’hébergement de groupe est principalement associée aux activités de la Cité des Paysages, il ne s’agit pas d’un hôtel qui pourrait être saisonnier, ouvert de mai à octobre.

C’est une erreur d’avoir confié l’hôtellerie et la restauration au Grand Sauvoy, ce qui a porté préjudice sur la réputation du site, selon les experts de la profession. Le Conseil Général aurait dû faire appel à des professionnels de la restauration, adapter l’offre au public, choisir une thématique particulière (cuisine régionale par exemple). Bien sûr, c’est plus facile de juger a posteriori. Certains évoquent l’idée de développer un restaurant d’application en lien avec la formation professionnelle. Pourquoi pas ?

La gestion par une administration ne permet pas la souplesse nécessaire à une activité d’hôtellerie et surtout de restauration.

Cela fait consensus qu’il faut de la restauration sur place. Cependant, il manque une offre de sandwicherie plus légère, sans tomber dans des produits comme les frites en décalage avec la vocation du site.

Pouvons-nous nous contenter d’un déficit cumulé de 350K€ pour le restaurant le Relais de la Colline ? Même si le déficit annuel diminue, notamment grâce aux missions confiées par le Département sur d’autres sites sous la forme de traiteur, le déficit demeure et pose la question de sa gestion. Un privé serait-il intéressé ? Thibaut LECLERC y était à l’époque. La question mérite d’être reposée.

Les orientations évoquées par notre collègue, Gautier Bruner, rapporteur de la mission, m’apparaissent intéressantes.

 

La ferme VAUTRIN

Poursuivons l’évaluation des politiques mises en œuvre par le département. S’agissant de la ferme VAUTRIN, le rapport de session du 29/06/1999 évoquait la « création d’une maison d’accueil touristique » grâce à cette maison en y recréant « une maison rurale avec une partie visite et une partie animation ». Cela devait être un exemple intéressant du patrimoine rural lorrain, une valeur d’exemple à faire connaître cette architecture. Certains ont évoqué le projet d’un écomusée du patrimoine rural

Au final, ce site a été acquis par le Département pour 99K€ en 1999 et l’investissement pour la protection de ce patrimoine (clos et couvert) entre 2003 et 2013 a coûté 479K€, soit un total de 578K€.

Vous conviendrez que cela apparaît exorbitant pour un site qui n’a pas trouvé sa vocation.

 

Monument Barrès

Concernant le Monument Barrès, il aurait juste fallu prévoir un plus une piste en ligne droite pour les personnes valides.

Il est regrettable aussi que le projet de pôle d’excellence rurale ait été retiré par le Conseil Départemental car la Communauté de Communes l’aurait porté. Il n’en fut rien.

Le tableau n’est pas tout noir bien sûr.

Nous avons constaté des réussites incontestables avec des partenariats positifs en matière d’éducation à l’environnement. Citons l’ENSAIA, l’école de géologie, l’école d’architecture de Nancy, l’école nationale des paysages de Versailles, la faculté de Géographie, les formations en aménagement paysager et gestion protection de la nature de Pixéricourt et Roville-aux-chênes sans oublier le collège de Vézelise. On peut dire que la Mission éducative est remplie.

 

Protection, Respecter l’identité particulière du site

Et il est indéniable que ce site est emblématique des paysages lorrains et peut être porteur d’une histoire et d’une culture.

Il est pourtant regrettable que le périmètre de classement au titre du code de l’environnement loi 1930 n’ait été jusqu’à présent pas étendu à SION et soit limité à la commune de Vaudémont avec le site du monument Barrès et une petite partie de la commune de Saxon-Sion.

Une extension du périmètre permettrait selon Danièle PESANTI, inspectrice des sites pour la Lorraine, de faire l’objet d’une opération Grand site de France.

Ce serait aussi beaucoup plus cohérent avec le souci des paysages porté par la cité des paysages.

Pour conclure, ce rapport nous a permis collectivement de dresser des enseignements précieux, et autant de pistes d’améliorations. Ce rapport doit constituer la base de la réflexion pour le futur du site.

 

Sion, un nom à assumer

Enfin, permettez-moi de vous partager des dialogues que nous pouvons constater aujourd’hui :

« Qu’avez-vous fait ce dimanche ? Nous avons été nous baladés à la colline de Sion. »

« Où est la réunion ? » « à Sion ».

En effet, on ne se rend pas à la « cité ».

La colline de SION, c’est son nom. Il ne faut pas l’oublier. Il peut paraître connoté pour certains. Mais c’est notre histoire lorraine, notre identité lorraine que nous devons assumer. Vive la colline de Sion !

Je vous remercie pour votre attention.