Renforcement du contrôle des dépenses sociales (RMI-RSA) pour une solidarité justifiée

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Session publique du 23 Juin 2016.

Question d’actualité de Jean LOCTIN :

(Conseiller départemental du canton du Nord Toulois)

Monsieur le Président,

Nous avons eu plusieurs fois l’occasion et surtout la nécessité de vous interpeller au sein de cette assemblée, en session publique, pour l’instauration d’un contrôle strict des dépenses d’actions sociales et en particulier celles concernant le RMI – RSA.

Lors de nos précédentes interventions vous vous êtes toujours retranché derrière le seul contrôle des indus non intentionnels évalués aux alentours de 210 000 € … mais quand est-il des autres ?

Si les dépenses des Départements explosent en raison du RSA et de l’APA, alors que les dotations de l’État sont en baisse et que la fiscalité est assez élevée pour que personne de sérieux n’envisage plus de l’alourdir, alors le contrôle de gestion est incontournable.

Ce contrôle ne vise plus seulement l’efficacité des politiques mais également et surtout en l’espèce, la stricte adéquation des aides avec les objectifs initiaux.

Renforcer les contrôles pour une solidarité justifiée est une nécessité.

Je vous avais déjà cité l’action menée par le Département d’Inde et Loire ; la liste s’allonge désormais : les Pyrénées Orientales, le Tarn, le Pas-de-Calais, l’Aube, le Nord … où des fraudes majeures ont été déjouées.

Monsieur le Président, vous et votre majorité, nous ont déjà fait savoir combien cette demande était « tabou » et surtout très politique, séparant les généreux des méchants, selon vous, les laxistes et les respectueux des impôts, selon nous.

Dans le Haut-Rhin, en cinq mois, 852 000 € ont été récupérés d’indus intentionnels. Faut-il en citer d’autres ?

Auriez-vous la faiblesse de vous imaginer plus vertueux et plus vigilant que nos collègues d’autres Départements, alors que par ailleurs nous écornons la solidarité entre nos territoires en réduisant l’aide à l’investissement des communes, par manque de moyens ?

Dernièrement, en Meurthe-et-Moselle, un de nos concitoyens recevait, sans aucune gêne le RSA alors qu’il avait une activité professionnelle de loueur de voiture : c’est suite à une dénonciation que l’affaire a été portée devant la justice : 7.140 € de RMI, 7.487 € de RSA, sans compter les allocations logement (504 €).

Abandonneriez-vous, la dénonciation de ce genre de situations aux -relents nauséabonds- par des concitoyens excédés par ces abus ? Ou allez-vous, enfin mettre en place, comme nous vous le demandons, une collaboration avec la CAF, les services des impôts, la sécurité sociale, la gendarmerie, voire la police de l’air et des frontières, et nous, pour que ces abus cessent ?

Ces gens, ceux qui trichent avec l’argent public, nous demandent qu’on les aide, à eux de justifier qu’ils en ont besoin.

Personne n’est hostile au soutien du pouvoir d’achat des salariés modestes ou précaires mais nous constatons les limites d’un régime totalement déclaratif assorti d’un seul contrôle à posteriori dont l’efficacité est contestable.

Monsieur le Président, nous vous demandons l’instauration immédiate d’une commission de contrôle à priori du droit aux versements du RSA, où nous aurions, nous autres élus, notre place ; je  vous remercie de la réponse circonstanciée que vous voudrez bien nous donner publiquement.

Je vous remercie de nous avoir écoutés.

 


Réponse de Sylvie BALON :

(Conseillère départementale du canton de Longwy)

Merci Monsieur le Président.

Parce que votre question propose la mise en place d’une commission de contrôle du droit au versement du RSA, ne vous en déplaise, mais effectivement, c’est moi qui vous répondrai.

En préambule, il est important de repréciser que le contrôle des indus non intentionnels n’existe pas. Il existe des contrôles. Le constat d’un indu non intentionnel ou d’une fraude caractérisée n’intervient qu’au moment du résultat du contrôle.

Vous nous demandez l’instauration d’une commission de contrôle, pourtant plusieurs instances existent déjà : le comité interventionnel départemental anti-fraude, Codaf, qui réunit, sous la co-présidence du Préfet de département et du Procureur de la République du chef-lieu du département, les services de l’État : police, gendarmerie,  administration préfectorale, fiscale, douanière, et du travail ; et les organismes locaux de protection sociale : Pôle emploi, URSAFF, CAF, Assurance maladie et retraite, le Régime Social des Indépendants et MSA. Ce Codaf définit la mise en œuvre de la stratégie nationale de lutte contre la fraude à l’échelle d’un Département. J’ai souhaité que le Conseil départemental y participe dorénavant.

Il existe également une commission fraude au sein de la CAF qui examine les situations individuelles sur lesquelles pèse un soupçon de fraude. Le Département y participe s’agissant du volet RSA. Celle-ci est composée d’experts-techniques.

Enfin, des instances dédiées à l’application des sanctions éventuelles pour non-respect de l’obligation d’accompagnement existent au sein du Conseil départemental. Ce sont des équipes pluridisciplinaires, rebaptisées « équipes consultatives » en Meurthe-et-Moselle, définies par la loi RSA, ces instances composées de professionnels et de bénéficiaires du RSA. Elles sont présentes sur chacun des 6 territoires de Meurthe-et-Moselle. Elles examinent les situations des personnes concernées par un manquement et décident, ou non, d’une sanction.

La création d’une nouvelle commission de contrôle au sein du Département ne semble donc pas nécessaire, d’autant que, comme je vous l’ai déjà indiqué à mainte reprise, la lutte contre la fraude existe déjà dans notre Département et que notre vigilance va bien au-delà du seul aspect financier. La lutte contre la fraude est principalement de la responsabilité de la CAF qui développe régulièrement des moyens de contrôle plus efficaces.

La CAF de Meurthe-et-Moselle a engagé un travail de développement informatique permettant le croisement des données et une identification précise de l’ensemble des contrôles RSA pour 2016. Le cas de fraude que vous évoquez remonte à 6 ans, date à laquelle la CAF a déposé plainte. Le premier jugement est actuellement en appel.

En 6 ans, les outils à disposition de la CAF pour opérer des contrôles ont évolué. Les contrôles se sont intensifiés. Tous les dossiers sont contrôlés sur pièce à l’ouverture des droits. Par ailleurs, la CAF a procédé, en 2015, à plus de 270.000 échanges informatiques avec ses partenaires : Direction générale des finances publiques, Pôle emploi, CPAM, Carsat, répertoire national commun de la protection sociale, et je pourrais en citer d’autres pour l’ensemble de ces prestations qui recoupent très souvent celle du RSA.

De plus, la CAF a procédé en 2015 à 1.596 contrôles sur place, toutes prestations confondues. 86 % des dossiers étaient concernés par du RSA. Nous n’avons, de ce point de vue, aucune raison de nous substituer à la CAF et le Département joue pleinement son rôle dans le processus de contrôle.

Nous nous refuserons également à entrer dans des campagnes de communication et à la mise en place de dispositifs qui portent atteinte à la dignité des personnes concernées qui sont bien plus nombreuses que les 2% de fraudeurs.